UNE PARTICIPATION HISTORIQUE
• L’image forte du dimanche 4 novembre 2018, c’est la mobilisation historique qui s’est traduite par d’impressionnantes files d’attente devant les bureaux de vote. Au lendemain du scrutin pour ou contre l’indépendance, le Premier ministre Edouard Philippe qualifiait l’événement de «véritable succès démocratique et populaire». Près de 175 000 électeurs étaient appelés aux urnes : 81,01 % des personnes inscrites sur la liste référendaire se sont prononcées. Soit quatre électeurs sur cinq. 
Un véritable succès démocratique et populaire.

• C’est plus que lors de la consultation sur l’Accord de Nouméa : le 8 novembre 1998, la participation avait été de 74,2 %. Même si pour ce référendum 2018, elle a été moindre aux Loyauté (61,17%). A l’inverse, le taux atteignait 86 % en province Nord. Elément important à l’intérieur de ce phénomène, la forte mobilisation de la jeunesse calédonienne.

Le retour de Bernard Lassauce :
Rappelons que près de 35 000 électeurs étaient exclus de la liste référendaire.

UN ECART BIEN REDUIT

• 56,7 % pour le «Non» à l’indépendance et 43,3 % pour le «Oui» : au soir du 4 novembre 2018, la victoire allait aux partisans d’une Calédonie dans la France. Mais à l’échelle du pays, cette victoire n’a pas été aussi massive qu’ils l’espéraient. Elle a eu pour beaucoup un parfum de défaite, tandis que le camp indépendantiste a pu lui trouver un goût de succès.
Il y a eu une démobilisation de certains loyalistes et une très forte mobilisation des indépendantistes.

• Les sondages indiquaient que 63 à 75 % des électeurs seraient susceptibles de refuser la pleine souveraineté. «Il y a eu une démobilisation de certains loyalistes et une très forte mobilisation des indépendantistes, qui se doutaient bien qu’ils allaient perdre ce référendum mais qui voulaient le perdre de manière honorable», analyse Patrice Jean, docteur en droit public. «Surtout, ces sondages ont en quelque sorte désigné aux politiques indépendantistes quels étaient les indécis : les jeunes majeurs et les femmes.»
L’analyse de Patrice Jean recueillie par Coralie Cochin : 


Un an après le référendum, Patrice Jean

• Reste que si l’on observe la vie politique calédonienne au long cours, cette balance correspond à un rapport de force récurrent. «Ils sont assez sans surprise par rapport au baromètre politique que constituent les élections provinciales», formulait le chercheur en géopolitique Pierre-Christophe Pantz au lendemain du référendum. «Même si ce ne sont pas les mêmes listes électorales. Je crois qu’on reste véritablement sur les mêmes tendances politiques depuis une trentaine d’années.» C’est-à-dire «une situation assez bipolaire, avec deux camps bien figés, que ce soit à l’échelle provinciale, à l’échelle communale ou à l’échelle intercommunale.» 
Des résultats sans surprise par rapport au baromètre politique que constituent les élections provinciales.

ANALYSE EN DETAILS
En province Sud, le «Non» s’est exprimé à 74,12 %. Un rejet de l’indépendance qui a été particulièrement marqué dans l’agglomération nouméenne. Tandis que dans le Nord et les Iles, de tradition indépendantiste, le «Oui» l’a respectivement emporté à 75,83% et 82,18 %. Beaucoup de communes présentent de façon saisissante un vote plutôt pour le «Non» au village et pour le «Oui» en tribu. On note aussi un millier de bulletins blancs.

Analyse détaillée dans l’édition spéciale du 5 novembre 2018 : 
UN SCRUTIN HORS NORMES

Ce premier des trois référendums prévus par l’Accord de Nouméa a mobilisé d’importants moyens :
• plus de 600 millions de francs pour l’organiser, aux frais de l’Etat ;
• 250 délégués pour veiller à son bon déroulement ;
• des observateurs internationaux ;
• un Comité des sages ;
• une commission de contrôle qui a entériné les résultats : elle a estimé «que le scrutin s’est déroulé dans d’excellentes conditions matérielles et d’organisation». Et qu’«aucune irrégularité n’a été de nature à altérer [sa] régularité et [sa] sincérité».

Aucune irrégularité n’a été de nature à altérer la régularité et la sincérité du scrutin.

UN APRES AGITE

QUEL SOUVENIR ?
Le dimanche 4 novembre 2018 a laissé des souvenirs très différents. «Je l’ai vécu, initialement, sereinement, mais les résultats m’ont plongé dans le plus profond doute, confie un électeur. La faible majorité loyaliste m’a beaucoup étonné. C’est après ça que j’ai pris la décision de quitter la Nouvelle-Calédonie pour regagner la métropole.»

La faible majorité loyaliste m’a beaucoup étonné. C’est après ça que j’ai pris la décision de quitter la Nouvelle-Calédonie.

Une autre retient «un climat de tensions», «un pays censé être le pays du partage et du vivre ensemble qui finalement était divisé en deux». Un troisième renchérit, au souvenir de cette consultation : «On croyait qu’on avait gagné, mais on a rien gagné. On attend la deuxième. On est perdus sur l’océan, en fait.» A l’inverse, cette dame semble soulagée : «Après les votes, ça éclaircit un peu les choses et du coup, maintenant je sais où je vais aller.»

Après les votes, ça éclaircit un peu les choses et du coup, maintenant je sais où je vais aller.

«J’étais excité», se rappelle ce partisan de l’indépendance. Tandis qu’une jeune femme l’avoue bien volontiers : «Je suis arrivée à l’urne sans savoir ce que j’allais voter ! ». 

Un micro-trottoir de Coralie Cochin :

Un an après le référendum, micro-trottoir

Cette parenthèse a par exemple inspiré le docteur en histoire Paul Fizin, auteur d’une nouvelle intitulée Les chroniques référendaires à l’intérieur d’un ouvrage collectif. Il y livre une photographie sociale et spaciale de la période qui a entouré le 4 novembre 2018.
Ses explications au micro de Coralie Cochin :
Après le référendum, la nouvelle de Paul Fizin

DURCISSEMENT
«Dans chaque camp, [le résultat du référendum] a contribué à durcir et finalement à radicaliser les positions», analyse l’historien et juriste Luc Steinmetz. «Il y a d’un côté les indépendantistes qui ne pensaient pas atteindre 43 %. Ils se sont sentis encouragés dans leur démarche, en disant que s’ils n’ont pas réussi la première fois, ils vont peut-être réussir la deuxième, voire éventuellement la troisième. Et puis de l’autre côté, il y a ceux qui avaient gagné : 57% de “Non” à l’indépendance, c’était une victoire du “Non”, mais moins importante que prévue. Du coup, chacun s’est durci sur ses positions en vue des scrutins référendaires suivants.»
Entretien avec Dave Wahéo-Hnasson dans le JT du 4 novembre 2019 :
Dans chaque camp, ça a contribué à durcir et finalement à radicaliser les positions.

ENTRE-TEMPS, LES PROVINCIALES
Certains y voient un effet direct du référendum, plus précisément de ce résultat. En tout cas, un an après, l’échiquier politique calédonien n’est plus celui du 4 novembre 2018 : les provinciales de mai dernier sont passées par là. Plusieurs partis loyalistes se sont constitués en une nouvelle plate-forme, L’Avenir en confiance, qui a remporté ces élections capitales. Calédonie ensemble en a perdu la main sur le gouvernement et la province Sud

CE NOUVEAU VENU QUI REFUSE LE BIPARTISME
DEUXIEME REFERENDUM LE 4 OCTOBRE 2020
Le dernier Comité des signataires, organisé le 10 octobre 2019 à Paris, a donné un début de cadre au deuxième référendum prévu par l’Accord de Nouméa. A l’issue de la (très longue) rencontre, le Premier ministre Edouard Philippe a proposé deux dates pour le prochain scrutin d’autodétermination : soit le 30 août, soit le 6 septembre 2020. C’est cette deuxième date qui a été retenue, a confirmé le haut-commissariat le 5 novembre. Un compromis entre les positions des participants. Ils ignoraient que la pandémie de Covid-19 allait déferler sur le monde et que le référendum serait décalé au 4 octobre 2020.

• Le Comité des signataires avait aussi dessiné en partie les modalités de ce prochain référendum : sur la question brûlante du corps électoral, mais aussi les procurations, les bureaux décentralisés, les inscriptions le jour-même, les observateurs ou encore la communication autour des éventuelles conséquences.

Retrouvez le relevé de conclusions du Comité des signataires :
XIXe Comité des signataires… by Françoise Tromeur
Ici, les réactions après cette dix-neuvième édition

TRIBUNE
Le jour-même du Comité des signataires, une tribune paraissait dans le quotidien Libération, dans laquelle une centaine de personnalités soutenaient l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie.

N TROISIEME SCRUTIN A L’HORIZON
Ce qui se dessine au-delà du référendum 2020, c’est le suivant. Le dernier Comité des signataires a évoqué cet éventuel référendum numéro trois. «Nous avons exclu que cette troisième consultation puisse être organisée entre le milieu du mois de septembre 2021 et la fin août 2022», a rapporté le Premier ministre, afin de «bien distinguer les échéances électorales nationales» (les présidentielles sont prévues en avril 2022, avant les législatives) et celles propres au Caillou.

PRISES DE PAROLE
Depuis, des politiques se sont faits entendre pour avancer des solutions alternatives et ainsi contourner l’absence de consensus sur l’avenir institutionnel. Le sénateur Pierre Frogier (Les Républicains) s’est basé sur les résultats du premier référendum pour envisager ce qu’il qualifie de «différenciation provinciale».  
Quelques jours après, l’ancien président du gouvernement Philippe Germain (Calédonie ensemble) appelait à bâtir avant tout un projet de société pour appréhender «le pays de demain» autrement que par le prisme du statut.

L’ENJEU DES NOUVEAU ELECTEURS
Dans l’immédiat, le corps électoral référendaire représentait de nouveau un enjeu politique majeur. Les indépendantistes défendent l’inscription d’office des natifs de statut civil coutumier. Ce ne sera pas le cas des natifs de droit commun, au grand dam des loyalistes. Quid de l’électorat des jeunes qui atteindront la majorité d’ici aux prochaines échéances ?
Le reportage de Natacha Cognard et Patrick Nicar  :

Nouvelle-Calédonie : tout savoir sur le référendum de 2018
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