Publié le 21/02/2017 à 08h40
Anne Bourges
Au tout début, c’était plutôt croquignolet ! Au Musée du ski de Besse, Pierre-André Chauvet collectionne les images désuètes d’une époque où l’on glissait sur des planches de bois en robes longues et culottes bouffantes. On imagine, derrière les poses figées pour les plaques du photographe, le genre de free-style que devait amener ce genre de glisse !
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La Revue d’Auvergne des Amis de l’université de 1978 mentionne la pratique du ski de fond « dans le Forez dès 1892-93, avec du matériel norvégien ».
Mais les auteurs proposent surtout cette piste devenue référence pour la glisse auvergnate : « Jean-Baptiste Blot, abbé de Besse-en-Chandesse, passe pour y avoir introduit la première paire de ski durant l’hiver 1901-1902… L’Auvergne n’a donc que peu de retard par rapport au Dauphiné où le précurseur s’exhibe pour la première fois en 1879. »
histoire du ski Sancy – utilisation limitée à Anne BOURGES
 
À côté de cette piste historique, Marie Léger, chargée de mission patrimoine pour la commune de Besse (*), a aussi retrouvé la trace d’une introduction parallèle, de l’autre côté du massif, sur les pentes de Saint-Anthème. « En 1894, Eugène Pellet, avocat à Ambert, aurait importé les premiers skis. Mais il a sans doute gardé cette pratique pour lui ». Tout le contraire de ce que fit l’abbé Blot !
Passionné de montagne, l’homme d’église avait découvert le ski pendant un séjour en Forêt noire. Il aurait fait fabriquer une première paire rudimentaire dès son retour à Besse. D’autres productions ont suivi au fur et à mesure de ses expérimentations… et de la conversion de ses ouailles à la glisse !
« Pour Jean-Baptiste Blot, le ski devait, en priorité, s’imposer par sa fonction utilitaire, comme mode de locomotion hivernal des populations isolées dans les fermes du pourtour des massifs », explique la Revue d’Auvergne.
Pierre-André Chauvet confirme en tout cas que les Bessards n’ont pas traîné à fabriquer leurs skis. On mit le menuisier à contribution pour les planches. On attela le bourrelier aux fixations…
Puis les premiers manuels de pratique arrivent, en 1905, avec l’instituteur Tixier. Quand il arrive en poste à Besse après un service militaire à Briançon, il commence à former les enfants…
histoire du ski Sancy – utilisation limitée à Anne BOURGES
 
L’histoire vaut son pesant de glaçons. Et surtout, elle explique pourquoi l’on voit autant de skieuses que de skieurs sur les clichés pris avant 1910 et jusqu’à la guerre.
Avec 2.400 livres dans son musée, Pierre-André Chauvet a mis l’Histoire en cohérence avec la petite histoire locale pour analyser l’étonnante mixité du ski bessard.
Conclusion ? « Après la séparation de l’Église et de l’État, les curés essayaient de garder leurs ouailles. Plutôt à droite, ils parvenaient à attirer des fidèles par le ski, pendant que les instituteurs plutôt à gauche prêchaient par le foot. » Pour résumer, le foot restait plutôt masculin, mais les curés skieurs ne pouvaient se priver d’attirer les dames à leurs paroisses… Résultat ?
histoire du ski Sancy – utilisation limitée à Anne BOURGES
 
Pierre-André Chauvet en veut pour preuve la Course des demoiselles du 29 janvier 1911. « Les dames étaient même en première ligne dans les compétitions ! »
À la vérité : « S’il y en avait une qui tombait et que l’on pouvait voir un bout de jupon. J’avais 15 ans et j’ai eu la chance de rencontrer des gens qui étaient sur la photo. J’ai eu leurs commentaires ».
De cette époque, les érudits de la Revue d’Auvergne ont retenu que le ski a échoué dans sa greffe sur le milieu pastoral auvergnat. Mais il a pris ailleurs : « Ce sont avant tout les cadres du monde rural – médecins, facteurs, gendarmes, cantonniers et gardes forestiers – qui adoptent ce mode de locomotion. »
En 1911, on trouve même l’industriel Marcel Michelin à la présidence du Ski club de Besse !
Désormais, il faut aussi compter avec les jeunes gens qui reviennent initiés de leur service militaire en haute montagne. Bref, le ski fait son chemin.
De sa prime jeunesse, Pierre-André Chauvet se souvient : « Les gens allaient veiller à ski en faisant 5 ou 6 km jusqu’à Compains et rentraient de nuit. Les messieurs n’hésitaient pas à faire 10 km de ski pour aller se retrouver dans un café et aller jouer à la coinche ».
Voilà comment le ski sportif a pris l’essor qu’on lui connaît chez nous. 
(*) Voir Super-Besse 1961-2011.
Anne Bourges
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