Même les histoires sans fin s’arrêtent un jour. À Soulac-sur-Mer, au nord de la côte girondine, celle de l’immeuble Le Signal devrait écrire son ultime chapitre au cours de l’année 2022. Il convient d’être prudent dans ce dossier à rebondissements, mais on peut raisonnablement parier sur une démolition de la bâtisse au second semestre, dans l’intervalle entre la saison balnéaire et l’arrivée des houles hivernales. « C’est notre objectif. Nous ne sommes pas à l’abri d’une surprise de dernière minute », prévient-on à la communauté de communes Médoc Atlantique, qui compte Soulac…
Même les histoires sans fin s’arrêtent un jour. À Soulac-sur-Mer, au nord de la côte girondine, celle de l’immeuble Le Signal devrait écrire son ultime chapitre au cours de l’année 2022. Il convient d’être prudent dans ce dossier à rebondissements, mais on peut raisonnablement parier sur une démolition de la bâtisse au second semestre, dans l’intervalle entre la saison balnéaire et l’arrivée des houles hivernales. « C’est notre objectif. Nous ne sommes pas à l’abri d’une surprise de dernière minute », prévient-on à la communauté de communes Médoc Atlantique, qui compte Soulac-sur-Mer sur son territoire.
Disposés en parallèle à la plage, le Signal et ses quatre étages de béton sont devenus le symbole du recul inexorable de la côte atlantique. Construit il y a soixante ans à deux cents mètres de la crête de la dune littorale, l’immeuble a été graduellement rattrapé par l’océan dont les houles hivernales mordent à pleines vagues dans le sable du rivage. Début 2014, alors qu’un train de tempêtes déboulait sur le golfe de Gascogne, la situation a été jugée si périlleuse qu’elle a motivé un arrêté d’évacuation. Il n’a jamais été levé. Personne n’est revenu contempler le coucher de soleil depuis les fenêtres. Désamianté sur les deniers de l’État, le fantôme du Signal n’est plus qu’une coque de béton vide.
Après des années de contentieux contre la commune, la communauté de communes et l’État, les copropriétaires ont été définitivement déboutés. Les efforts des parlementaires girondins (Benoît Simian à l’Assemblée et Françoise Cartron, à l’époque au Sénat) ont permis de sauver l’essentiel. Une enveloppe de sept millions d’euros a été débloquée pour indemniser la copropriété abandonnée à son sort. Elle représente 70 % de la valeur estimée des lots, du temps où ils étaient vendables sur le marché.
Porté par la loi de Finances rectificative de juillet 2020, le dédommagement fait partie d’un protocole dont la complexité a fait flotter des brumes migraineuses dans les couloirs de la préfecture de la Gironde. Le Fonds de prévention des risques naturels majeurs (dit Fonds Barnier) ne peut pas être actionné pour des mouvements du sol dunaire. Aussi l’expropriation de l’immeuble à sa valeur initiale a-t-elle été écartée. Il a fallu se reporter sur une solution ad hoc : une transaction amiable pour chacun des 78 lots de copropriété. Chaque propriétaire cède son bien contre l’euro symbolique à la Communauté de communes Médoc Atlantique en renonçant à tout recours devant les tribunaux. L’État, de son côté, verse au dit propriétaire une somme qui compense la « perte d’usage » du bien cédé, inaccessible depuis huit ans.
L’affaire aurait dû être bouclée le 31 décembre 2021. Avec une menace pour les copropriétaires qui s’y seraient opposés : l’expropriation à la valeur actuelle des lots, c’est-à-dire zéro euro, zéro centime. Épuisés par tant d’années de combat, les intéressés se sont résolus à donner leur accord. À l’origine, on dénombrait 75 propriétaires distincts pour les 78 appartements. Certains d’entre eux sont décédés, et les successions ont été entravées par le poison de l’incertitude. Il y a aujourd’hui 99 ayants droit, dont des mineurs et des personnes qui ne résident pas en France. « 92 d’entre eux ont été indemnisés et 6,5 millions des 7 millions de l’enveloppe ont d’ores et déjà été consommés », pointe-t-on en préfecture.
Les autorités espèrent surmonter les derniers obstacles dans les prochaines semaines. Le sort de huit lots est encore pendant. « On a mené beaucoup de transactions à leur terme en peu de temps grâce à une très bonne collaboration entre l’État, la communauté de communes et les juristes du Sdeeg (le Syndicat départemental énergies et environnement de la Gironde) qui sont habitués à traiter ce genre de dossiers », relève Frédéric Boudeau, le directeur général des services de l’intercommunalité Médoc Atlantique.
Au final, celle-ci se retrouvera propriétaire de la carcasse, un préalable indispensable à la démolition. La communauté de communes peut dès maintenant se pencher sur les appels d’offres pour le chantier, quitte à le décaler en cas d’impromptu. L’hiver 2021-2022 sera-t-il le dernier ? À Soulac-sur-Mer, on souhaiterait en terminer le plus rapidement possible et tourner la page. De solides raisons liées aux colères de la météo militent en ce sens. Si les fondations sur pieux du Signal ont fait montre d’une remarquable stabilité au fil du temps, elles ne sont pas à l’abri d’une virulente tempête qui verrait l’océan lancer ses griffes pour aller balafrer la dune littorale.

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